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14 septembre 2018

Sur l'identitarisme


Les questions relatives à l’identité ont, depuis longtemps, été engendrées par les diverses sociétés, dont elles manifestent les divisions, les fractures, les conflits, les clivages qui, selon les lieux et les époques, y surgissent immanquablement. Elles accompagnent les luttes politiques, de même qu’elles participent à la vie culturelle d’une société jusqu’à contaminer les arts et les lettres, un domaine par essence voué à l’expression subjective.  

Mais qu’est-ce que l’identité? Autour de ce thème, il convient de distinguer cette « quête d’identité » de la part d’un individu qui évalue les changements que le temps et les circonstances ont apportés à son existence, et que résume bien la question classique : « Qui suis-je? » Question dangereuse, car elle s’ouvre sur le néant d’une réponse possible : « Je ne suis personne! ».

Non, la question identitaire est d’un autre ordre : « J’appartiens à qui ou à quoi ? » L’individu est sommé d’inventorier ce par quoi il est assujetti. On peut regrouper de telles conditions d’assujettissement sous quatre grandes thématiques:

- l’ethnicité, la « race », la langue primordiale, les traditions, le lien à une terre, une patrie, une nation
- le sexe, le genre, la sexualité, 
- une classe sociale, un métier ou profession, les rapports d’accès à des ressources matérielles, les niveaux d’instruction et de culture
- les religions, les idéologies, les modes de pensée, styles de vie

En vérité, pour chaque individu s’enchevêtrent ces vecteurs d’un sentiment d’appartenir à quelque chose qui à la fois le façonne, mais le dépasse. Ces identités ne sont pas toutes d’égale force chez l’individu : certaines sont primordiales, d’autres contingentes. Devant les conditionnements et facteurs d’assujettissement, les réactions varient: nombreux sont ceux qui acquiescent, le plus souvent sans y réfléchir, à tout ce qui dès sa naissance les surplombe et qui ne cessera de les accompagner leur existence durant. Ce qui ne laisse qu’une faible marge à l’autodétermination devant sa condition socio-biologique, ou au regard de traditions religieuses ou culturelles. D’autres se rebiffent devant cet acquiescement, décrié comme trahison de soi-même. Avec leurs combinaisons innombrables chez l’individu, les identités ressemblent au cube de Rubik. 

Loin d’une métaphysique de la « vie », d’où la raison d’être d’un individu est d’assurer la transmission du génome comme d’assurer la pérennité des traditions, la vie ne se réalise que par le déploient à chaque instant de chaque spécimen de l’espèce, autrement dit, des individus. De fait, il n’y a que des individus. L’égarement et les pèlerinages par les sentiers d’une identité collective se ramènent toujours en fin de compte à la vieille question :
 « Qui suis-je? »